CHOISIR LE TERRAIN ET LE JOUR DE LA BATAILLE (Jean Goychman)

Lorsque je suis devenu responsable du SNOMAC (Syndicat National des Officiers Mécaniciens de l’Aviation Civile) au niveau national, un de mes prédécesseurs m’avait glissé dans l’oreille qu’ il était arrivé que certains dirigeants d’Air France justifient de mauvais résultats financiers en raison de grèves des navigants et que, en général, les « incitations à la grève » se produisaient à partir du mois d’octobre, au moment où les mauvais résultats de l’exercice commençaient à poindre.

 

 

Je ne sais pour quelle raison, et sans-doute suis-je en proie à un scepticisme exacerbé, mais je vois comme une analogie (une sorte de cousinage, aurait dit le regretté Michel Audiard), avec la situation sociale de notre pays. Je ne pense pas que notre gouvernement et notre président soient réellement perturbés par les déficits budgétaires présents ou à venir. De ce point de vue, la célérité, pour ne pas dire l’urgence avec laquelle a été menée cette réforme des retraites me paraît suspecte.

Ils auraient voulu « agiter le chiffon rouge » qu’ils ne s’y seraient pas pris autrement. Tout y est passé. Examen par les députés limité dans le temps, passage forcé au 49-3, couche de vernis par le Conseil Constitutionnel et, cerise sur le gâteau, promulgation dans la volée. Il faut quand même admirer en connaisseur le risque (bien calculé, mais risque quand même) de la motion de censure, évitée à neuf voix près ; chapeau l’artiste !

Entre-temps, un petit discours de mi-journée, deux ou trois visites sur des chantiers ou dans des boutiques, histoire de chauffer la salle et de faire monter l’ambiance. Bref, une démonstration comme à la parade pour faire monter les tensions sociales au point d’occulter tout autre sujet d’actualité.

CACHER CE QUI NE DOIT PAS ÊTRE VU

Du côté de la situation internationale, les bouleversements sont d’une ampleur exceptionnelle et se font à une vitesse prodigieuse. Car, si la guerre en Ukraine constitue, là encore, le foyer visible à des kilomètres, un autre conflit se déroule dans les profondeurs cachées d’une activité diplomatique et surtout financière dans laquelle, de par sa nature, le silence est de mise…

L’objectif est de détrôner le dollar de sa position dominante en tant que monnaie utilisée pour le commerce international.

Notre président, qui est un habile manœuvrier, connaît, à l’évidence, toutes les conséquences, y compris sur le plan social de la crise financière et bancaire qui menace.

Il faut avoir présent à l’esprit que le dollar est une monnaie purement fiduciaire depuis 1971, date à laquelle il a perdu sa convertibilité en or grâce à laquelle il s’était imposé depuis 1944.

Cela veut dire qu’il n’a aucune valeur intrinsèque autre que celles du papier et de l’encre servant à imprimer les billets.

Or, il existe un projet d’une autre monnaie qui, s’il arrivait à son terme, pourrait porter un coup fatal au dollar, entraînant ainsi la fin de la domination américaine dont il est l’instrument essentiel. Resté dans l’ombre jusqu’à un passé récent, ce projet a été initialisé par la Chine il y a une quinzaine d’années mais n’a été révélé dans toute son ampleur que depuis la guerre en Ukraine.

Les pays du groupe des BRICS représentent environ 50% de la population mondiale et leur PIB a dépassé celui de l’Occident.

Les choses s’accélèrent et ce sont maintenant un grand nombre d’autres pays qui envisagent leur adhésion à ce projet, dont notamment les pays du Moyen-Orient producteurs de pétrole. Les votes de l’ONU au sujet des sanctions ont permis de constater que l’Occident était de plus en plus isolé face au reste du monde. Or, si l’Occident représentait en 1971 environ 25% de l’humanité et 90% du PIB planétaire, ces chiffres sont tombés aujourd’hui à 12% de la population et moins de 40% du PIB. Cela, tous les gouvernements de la planète le savent. Certains gouvernements s’en réjouissent, d’autres s’en inquiètent, et c’est le cas du nôtre. Jusqu’à présent, Emmanuel Macron et son équipe feignent de l’ignorer. C’est pourtant l’hégémonie américaine, mise en place par une oligarchie financière à laquelle ils sont redevables de leurs parcours, qui vacille aujourd’hui.

Ils sont probablement beaucoup plus inquiets de la tempête financière qui s’annonce que du devenir de notre système de retraites. Mais ce n’est pas le seul danger. Ils savent qu’ils vivent sur une poudrière. La politique sanitaire et les contraintes qu’ils ont imposé aux Français risquent de leur revenir en « boomerang » car, peu à peu, la vérité sur les statistiques réelles de ce phénomène apparaissent. Ajoutons à cela un scepticisme grandissant quant à la réalité d’un réchauffement climatique uniquement dû à l’homme, condition sine qua non pour justifier une décroissance de l’économie dont les conséquences sociales sont imprévisibles.

Enfin, pour ajouter une ombre supplémentaire, la « dédollarisation » s’accélère et, avec elle, la mise en place d’un monde « multipolaire » qui marquera la fin de la mondialisation « globaliste » qui, après avoir fait disparaître les souverainetés locales des Etats-nations, pensait pouvoir imposer un gouvernement mondial composé d’experts dans un monde dépourvu de frontières et dans lequel les peuples se trouveraient tous nomades et apatrides.

QUEL EST LE RAPPORT DE FORCES ?

Quel est le rapport des forces aujourd’hui entre le peuple et le gouvernement ?
Beaucoup de Français découvrent aujourd’hui, incrédules, que la souveraineté qu’ils pensaient pouvoir exercer pleinement, bien qu’apparemment garantie par la Constitution, est en réalité soumise à la décision du Président de la République. Dépourvu de majorité parlementaire, il vient de faire l’éclatante démonstration que rien ni personne ne pouvait l’empêcher de prendre des décisions contraires à la volonté populaire, très majoritairement opposée à celles-ci. Le référendum traditionnel, qui aurait pu servir à exprimer ce désaccord, est une des prérogatives incontournables de l’Elysée.

Ajoutons à cela une jurisprudence que le Conseil Constitutionnel vient de créer : l’usage de l’article 49-3 n’est pas limité, même s’il heurte de plein fouet le fondement de la souveraineté du peuple, socle de la démocratie.

QUE PEUT OPPOSER LE PEUPLE ?

Un blocage du pays par la grève ?

Ce serait, peut-être, une façon de mesurer le rapport des forces. Le problème est que nous dépendons pratiquement tous de nos revenus mensuels.
Les salariés  n’ont qu’ une faible marge d’ajustement, mais tous ne peuvent pas, dans leur immense majorité, suivre une grève de longue durée.
Quel que soit leur niveau de ressentiment, ils ont charge d’âme et ne peuvent entraîner leurs proches dans une situation qui deviendrait rapidement désespérée.

Manifester pacifiquement ?

Cela semble totalement inutile. Ces manifestations de masse pouvaient avoir un effet avec des gouvernants qui ne cherchaient pas à contourner la démocratie. François Mitterrand, puis Jacques Chirac ont agi en sages, car ils ont relativisés les choses. Nous ne sommes pas dans ce cadre.

Immobiliser le pays en bloquant les moyens de transport ?


Cela pourrait obtenir des résultats mais cela suppose également que nos dirigeants agissent dans l’intérêt de la nation. Compte-tenu de ce à quoi nous assistons depuis une quinzaine d’années, le doute est permis. La crise énergétique que nous connaissons, suite aux décisions aberrantes sur le nucléaire ne peut qu’instruire ce doute.

En vérité, l’arsenal du peuple est assez démuni.

QUE RÉSERVE L’AVENIR ?

Nous sommes entrés dans une logique décliniste. C’était un moyen sûr pour détruire notre souveraineté en nous rendant dépendant des autres. Emmanuel Macron, euro-féréraliste et mondialiste convaincu, en a fait l’axe essentiel de sa politique. Il suffit de se rappeler la vente de certains de nos joyaux industriels et d’une façon plus générale, la part constamment régressive de notre activité industrielle. Le prix de l’énergie n’incite plus les industriels à s’implanter sur notre territoire et certains commencent déjà à migrer, notamment vers les Etats-Unis.

Tous ces phénomènes auront probablement des effets cumulatifs et provoqueront une crise sociale au moment où les gens seront déjà fragilisés par celle que nous connaissons.

C’est, peut-être, le calcul fait par nos dirigeants, ce qui expliquerait l’intransigeance actuelle…

Jean Goychman  

17/04/2023

9 Commentaires

  1. “…Beaucoup de Français découvrent aujourd’hui, incrédules, que la souveraineté qu’ils pensaient pouvoir exercer pleinement, bien qu’apparemment garantie par la Constitution, est en réalité soumise à la décision du Président de la République…” La souveraineté c’est la détention de l’autorité suprême. Force est de constater qu’elle n’existe plus puisque qu’aucune décision importante ne peut être prise sans l’aval de Bruxelles. Nous n’avons plus de frontières nationales, plus de monnaie nationale, nos lois sont la traduction en droit français des décisions européennes. L’UE essaie même de s’accaparer notre dissuasion et de partager notre siège permanent à l’ONU. Veut-on expulser un imam à tendances terroristes que la CEDH s’y oppose. Modifier un taux de TVA ? Aider une entreprise en difficulté passagère ? L’Europe refuse. Et Macron ne cesse d’évoquer la ” souveraineté européenne “.

  2. J’espère que votre propos trés réaliste n’est pas fait pour dédouaner ce président porte parole
    d’une politique paranoiaque qui dure depuis des années : OUI ce sera peut être le dernier responsable et devra en ce sens payer pour les autres ,puisqu’il le demande en disant de façon provocatrice “vener me chercher”: Car dans le fond ,le peuple ne demande pas grand chose : juste vivre ,se soigner , chercher à maitriser son destin:De toutes ses inventions folles,démentes qu’il n’a pas demandé ,même pas imaginé ,qu’ a t’il récolté en dehors de guerres encore plus horribles.Le peuple demande à marcher à une allure sereine,humaine,comme un animal ,mais ces fous de l’invention ont tout tué pour leurs propres intêrets:ce sont eux les coupables ,toutes ces têtes trop bien bien faites et ceux qui les aident qui sont responsables.Je suis étonné que le sujet n’ait pas attiré et suscité des interrogations et des plumes débridées..C’est allé trop vite , sans ethique , sans reflexion en dehors de reflexions technico financières: Tout me fait penser que quelque part l’homme est comme un animal qui se mord la queue.Il ya des inventions qu’on a apprécié mais stop ,trop n’en faut.Mais peut être que c’est pour défier l’adage :qui n’avance pas recule :Adage qui tue l’humanité

  3. Il a aussi un problème important que la grande majorité des peuples de l’Europe ne connaît pas: l’évolution de la situation économique mondiale et toutes les tractations qui se trament pour acter la chute du dollar comme monnaie de base pour les échanges mondiaux. Et cet énorme enjeu qui va bouleverser la vie des citoyens se passe ds les hautes sphères de la géopolitique mondiale. Ces tractations étant par contre bien connues de nos dirigeants, la lutte sociale entre eux et les Français ( idem ds les autres pays de l’union européenne) la lutte est forcément inégale, tant au niveau des moyens à mettre en jeu qu’à celui des sujets à aborder. Il est difficile de discuter et à fortiori de s’entendre si on ne se bat pas sur le même terrain.

    • Malheureusement c’est ça : C’est pour cette raison que notre rhétorique doit être pragmatique et philosophique et nos dirigeants bien qu’ils disent depuis toujours que leur rôle n’est pas de nous rendre heureux,ils doivent néammoins tendre le plus possible vers nos objectifs élémentaires.Car sinon à quoi servent ils?

  4. Je viens de lire le résumé du discours de macron (je n’écoute plus jamais son verbiage), et j’en retiens un point positif : il veut faire ses “cent jours”, comme avant lui un certain Napoléon, sans doute. On sait sur quoi ont débouché les cent jours de l’Empereur. Nous avons donc une chance, si l’histoire se répète, de voir Macroléon partir en exil dans trois mois !

    • AH non ne comparez pas macron à napoléon : ni à de gaulle : ces deux grands hommes eux ont fait au moins des choses marquantes pour les hommes :l’un le code civil ,l’autre le droit de vote aux femmes: Certes ces deux grands personnages en suivant leur paranoia s’y sont cassé le nez.Macron lui n’a rien fait , ne laissera de trace que celle d’un personnage atteint de cecité et de surdité et sa paranoia l’emmenera à hair le peuple de france et j’espère s’y casser le nez: C’est un personnage imbu de sa personne diabolique, toxique pour la france:et j’aurais bien voulu dire “a été” mais notre législation est absurde: Il faudrait là un 49/3 pour le virer mais vous voyez le 49/3 ne marche que dans un sens.C’est la justice.

    • Mais il y a Napoléon et Napoléon. Le notre n’a rien de commun avec le premier, lui se présentait toujours la main sur le cœur, le notre sur son portefeuille, le fric n’étant pas que son moindre défaut, loin de là, il est à la bonne place, quant à le voir partir en exil comme son précédent imagé, faut pas se faire du cinéma.

  5. Bon ce soir pour la première fois depuis longtemps sur les conseils d’un patient ,,j’ai fermé la télé de 20 H à 20H30.Mais pourquoi ?C’est la petite devinette: je vous previens ,même si vois trouvez ,vous ne gagnez rien car c’est trop facile.:Une petite info pour vous mettre sur la voie:C’est l’histoire d’un gars qui ne marquera l’histoire que pour son incompétence :Il est toujours d’accord mais il fait toujours ce qu’il veut C’est dommage qu’il ne s’appelle pas louis car je l’aurais appelé LOUIS LE MAUVAIS ex marquis le morveux d’enarque ou plutôt d’arnaque d’aprés la connaissance historique
    de notre cher vénéré eric de verdeilhan

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