LA MÉMOIRE DE JEAN MOULIN MERITAIT MIEUX (Jean Goychman)

Tenu à l'écart des manifestants, Emmanuel Macron s'est rendu ce lundi au mémorial de la prison de Montluc de Lyon pour rendre hommage à Jean Moulin et aux résistants.

 

 

L’impopularité de notre président, qu’il feint d’ignorer, le pousse cependant faire des choses qui pourraient, si ce n’était le contexte solennel et dramatique, sembler cocasses.

Descendre l’avenue des Champs-Elysées est une coutume quasi-institutionalisée par le général de Gaulle avant même l’existence de la 5ème République. Nous avons tous en mémoire le fameux « Ah, c’est la mer ! » du général le 26 août 1944, qu’il rapporte dans ses « Mémoires de guerre ».

Il contemplait alors la multitude qui s’était spontanément rassemblée autour de lui dans cette indicible liesse de la libération de Paris.

Même décor, mais sans « la mer » ce 08 mai. L’image du véhicule du président descendant l’avenue déserte, suivie de la Garde Nationale semblait surréaliste. Elle contrastait singulièrement avec celle du 26 août 1944. Emmanuel Macron y-a-t-il seulement pensé ? Ces défilés sont faits pour que le peuple de France puisse s’associer à une commémoration historique. Peut-on un seul instant imaginer qu’une telle cérémonie, avec tout ce qu’elle représente pour notre nation, se fasse en dehors du peuple ? Cette photo, de la figure d’Emmanuel Macron en gros plan sur un écran géant posé sur la place de l’Étoile, appelée place Charles de Gaulle, illustre tout le ridicule de cette affaire.

UN DISCOURS PATRIOTIQUE EN APPARENCE MAIS D’ESSENCE FÉDÉRALISTE.

Passé le comique de cette situation inédite, la journée allait se poursuivre du côté de Lyon.

Notre président ayant voulu honorer la mémoire de Jean Moulin, pensant probablement qu’il y aurait à la clé un petit bonus de cette popularité qui lui fait tant défaut.

Jean Moulin: derniers secrets sur son arrestation - L'ExpressBien sûr, et nul ne peut le contester, Jean Moulin est une figure incontournable de la Résistance, que de Gaulle a reconnu comme son « compagnon » pour la Libération de la France et le décora de la croix de cet ordre devenu prestigieux dès octobre 1942. Mais le discours du président ne fût pas à la hauteur de l’homme et de sa destinée. Je ne sais qui l’a écrit, mais vouloir mettre dans la même intervention la barbarie nazie, que personne ne conteste, et libérer la France, sont deux choses de nature essentiellement différentes. Jean Moulin avait été choisi par de Gaulle pour être son unique représentant en France occupée. Sa mission, de la plus haute importance, était de rassembler sous l’autorité du Général tout ce participait de la résistance française pour que, le moment venu, la France retrouve sa place dans le camp des vainqueurs, gommant ainsi la parenthèse honteuse de la collaboration. Jean Moulin avait contre lui à la fois l’occupant, mais aussi l’administration de l’État français qui avait choisi de collaborer. Craignant peut-être que le seul nom de Jean Moulin ne fasse à lui-seul suffisamment d’audience, le rédacteur a peut-être voulu « élargir le plateau » et rappeler les fondements de la République par les combats qu’elle avait dû livrer depuis 1792. Emmanuel Macron commet une erreur en disant que le but ultime de l’action de Jean Moulin était de rétablir l’ordre républicain. Non, le seul but de de Gaulle était de libérer la France, grâce à l’action extérieure de la « France libre » qui continuait d’incarner la République et de l’action intérieure de la Résistance qui, le moment venu, se réuniraient pour ne plus faire qu’une seule France. Certes, de Gaulle et Jean Moulin étaient des républicains, mais c’étaient surtout des patriotes et, comme il est inscrit sur la croix des Compagnons de la Libération :

« Patriam servando victoriam tulit » (Servir la Patrie en apportant la Victoire)

militarium medaille insigne ordre de la liberation

La Patrie est une république, mais c’est avant tout notre patrie. Et c’est tout le problème de notre président, il veut remplacer la notion d’attachement à la patrie par celle d’attachement à la république. Cette différence est essentielle car la notion de « patrie » s’oppose frontalement à la conception de l’Europe qui est la sienne. Il combat depuis toujours cette notion de patrie car elle interdit par elle seule toute forme d’intégration européenne. La vision européenne de de Gaulle a toujours été celle d’une « Europe des Patries » alors qu’une « Europe des Républiques » est parfaitement compatible avec une fédération européenne. Emmanuel Macron aime brouiller les cartes afin de mettre dans l’esprit des gens que, en définitive, de Gaulle et lui menaient le même combat et que son action s’inscrivait dans la continuité de celle du Général.

L’UN EST AUX ANTIPODES DE L’AUTRE

Pourtant, tout les sépare. En patriote chef d’État, de Gaulle recherchait la grandeur de la France qui devait s’imposer naturellement, de par son rayonnement passé et présent. Pour cela, il n’admettait aucune entorse à la souveraineté de la France et rien ni personne ne pouvait décider à sa place.

Il ne voulait pas pour autant que la France domine les autres pays, mais ne voulait pas qu ‘elle se laisse dominer par l’un quelconque d’entre eux, fût-il plus puissant militairement ou économiquement.

Emmanuel Macron est avant tout un « mondialiste ». Il sait parfaitement que l’Union Européenne n’est qu’une étape, une sorte de catalyseur destiné à établir un territoire sans frontières et ouvert à tous les vents pour l’étendre de proche en proche à toute la surface de la planète. Mais il sait également que s’il le montre trop clairement, les peuples ne suivront pas (et en particulier le peuple français). Il doit donc faire sans lui, tout en lui faisant croire que seul l’avenir de la France le préoccupe. Et pour cela, rien de mieux que de mettre ses pas dans ceux de de Gaulle.

Pourtant, il sait parfaitement que ce projet mondialiste ne peut qu’aboutir à la disparition des peuples et des nations, qu’elles soient ou non des républiques. Et il sait également que la démocratie sera une victime collatérale, mais on ne doit en parler en aucun cas.

D’où une sorte de « nov’langue » dans laquelle la « souveraineté » est mise à toutes les sauces parce que c’est très « gaullien » et que ça fait vendre…

A TOUT CELA S’AJOUTE AUJOURD’HUI UNE NOUVELLE DONNÉE : LE TEMPS.

La guerre en Ukraine, dans laquelle, n’en doutons pas, les historiens y verront un tournant important, peut-être même un changement géopolitique complet, ne doit probablement rien au hasard ni à la colère des protagonistes. L’avenir du dollar s’assombrissait depuis un certain temps, et les plus avisés le voyaient condamné. Monnaie purement fiduciaire depuis plus de cinquante ans, le dollar, à la fois monnaie domestique américaine et monnaie de réserve internationale, procurait un avantage exorbitant aux États-Unis puisqu’il pouvaient l’émettre sans limite. Cependant, son monopole (ou presque) était une condition essentielle et il ne pouvait survivre à une autre monnaie qui, elle, aurait une valeur intrinsèque. C’est un peu la différence entre une « fausse-monnaie » et une monnaie établie sur des vraies valeurs économiques. Or, cette guerre en Ukraine a précipité les choses. Les sanctions économiques imposées à la Russie par l’Occident ont permis au reste du monde de montrer qu’ils ne suivaient plus l’Occident. Le rêve occidental d’un monde monopolaire avec un gouvernement mondial d’experts et de banquiers devenait chimérique.

C’est ainsi qu’une sorte de « course de vitesse » s’engage actuellement pour d’un côté accélérer le projet monopolaire occidental et un monde multipolaire probablement souhaité par une grande majorité de la population mondiale.

NOTRE PRÉSIDENT SAIT-IL ENCORE OU IL VA ?

C’est LA question, mais Emmanuel Macron n’a guère envie d’y apporter une réponse. Il préfère visiblement appliquer la formule à toute épreuve du Cardinal de Retz :

« On ne sort de l’ambiguïté qu’à son propre détriment »

Jean Goychman  

10 mai 2023

8 Commentaires

  1. Ce pauvre McKron il ne manquait plus que le croassement des corbeaux lors de son défilé. Il a préféré le silence de mort que d’entendre les huées de la foule. Il est fini, il ne représente plus que lui même et je pense que le 14 Juillet va être du même acabit, et pour ces vacances à brégançon ce sera pareil, il n’aura pas intérêt à mettre le nez dehors. Tout ce bordel pour une histoire de 14 milliards d’euro, lui qui aura endetté la france et les francais de 1000 milliards d’euro supplémentaire entre ces fonctions de ministre et de président jusqu’à aujourd’hui. Il croyait quoi que les français allaient se laisser faire encore longtemps, je crois que des couleuvres nous en avons assez avalées. Sa gestion de la plandémie covid 19 et le célèbre nous sommes en guerre, le prix de l’énergie totalement indigeste (alors qu’il pourrait en être autrement, personne ne parle de ce scandale sauf le sénateur Gay et Le Floch Prigent), le prix de l’alimentaire qui ne cesse de monter, la guerre en Ukraine pour laquelle il a de l’argent (sans consulter l’assemblée nationale). La coupe est pleine, et le peuple ne supporte ni sa morgue, ni son arrogance. ” trou du cul ” lui a balancé un manifestant dans l’est de la france.

  2. D’un nain vous ne ferez jamais un géant … à chacun sa place dans l’histoire du pays, partant de la, voyez la place occupée et réservée à un DeGaulle quant d’aucun finira aux oubliettes , le plutôt possible pour libérer la patrie sera salutaire.

  3. “L’avenir du dollar s’assombrissait depuis un certain temps, et les plus avisés le voyaient condamné. Monnaie purement fiduciaire depuis plus de cinquante ans, le dollar, à la fois monnaie domestique américaine et monnaie de réserve internationale, procurait un avantage exorbitant aux États-Unis puisqu’il pouvaient l’émettre sans limite.” Et comme les USA ont un déficit de plusieurs milliers de milliards de dollars, si demain ceux qui leur doivent ne serait que les intérêts de leurs emprunts ne remboursent plus, les USA implosent. Et avec eux l’occident, d’où les guerres en cours ou à venir pour relancer une machine économique américaine.

  4. “Jean Moulin avait contre lui à la fois l’occupant, mais aussi l’administration de l’État français qui avait choisi de collaborer.” Cependant il était bien entouré par nombre de communistes ou de crypto communisme, ce dont s’était aperçu Fresnay, résistant lui aussi de la première heure. Je pense que Moulin dont le courage n’est pas en cause avait lui aussi une vue à long terme de l’avenir de la France et qu’à terme, s’il avait vécu, aurait pu faire de l’ombre à De Gaulle. Bref ce dernier s’en ait sans doute rendu compte d’où la machiavélique trahison de Caluire. Voir à ce sujet les nombreux livres sur MOULIN et ceux de Fresnay. Bien entendu les historiens nous en diront plus dans quelques années mais vu qu’il est au Panthéon je doute que tout cela évolue dans l’immédiat.

    • Bonjour Allobroge. Si vous voulez remettre en lumière les évènements profonds de cette période, je vous conseille l’excellent livre d’Eric Branca “l’ami américain”. Au delà de la trahison qui s’est soldée par la mort de Jean Moulin, on ne peut rien exclure. D’après Eric Branca, et même Emmanuel Macron y a fait une (petite) allusion, les diplomates américains ont soutenu Vichy pratiquement jusqu’à la libération de Paris. Je dirais que la mort de Moulin n’a peut-être pas été une mauvaise nouvelle pour eux…
      Quant à l’idéologie de Jean Moulin, j’avais pu étudier nombre de documents qu’Yves Boisset, lorsqu’il a réalisé son documentaire m’a laissé parcourir. Il en ressort qu’il avait des amis partout, y compris chez les Francs-Maçons, et c’est probablement une des raisons du choix de de Gaulle. Seule question: pourquoi Raymond Aubrac n’a-t-il pas reçu la croix de la Libération?

      • Vous posez de bonnes questions qui trouveront sans doute leurs réponses dans quelques années. J’ai lu récemment un ouvrage de 1000 pages environs : “Présumé Jean Moulin” de jacques BAYNAC. On peut et on doit s’interroger après cette lecture sur l’environnement de Moulin. Sur les subsides reçus par lui par parachutages, sur ses allées et venues en France occupée et jusqu’au Portugal, sur ses accointances. Je sais la période difficile et suis toujours surpris de la manière et ou la facilité avec laquelle se déplaçaient certains. Enfin j’ai bien conscience que poser ces questions c’est aussi remettre en cause une partie de ses actions (ce qu’i n’enlève rien à son courage, mais chez nos ennemis il y avait aussi des gens courageux). Et enfin c’est une icône Gaulliste donc intouchable jusqu’au jour où…d’autres informations seront dévoilées.

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