LE « BROUILLARD DE LA GUERRE » PRODUIT SES EFFETS. (Yann Bizien)

Petit à petit, le « brouillard de la guerre » par procuration des Etats Unis contre la Russie en Ukraine produit ses effets.

 

 

Alors que les dirigeants du G7 se réunissent à Hiroshima, ville rendue à l’incandescence nucléaire le 6 août 1945, il est parfaitement clair qu’Emmanuel Macron préfère désormais le confort de l’alignement sur les américains aux avantages de la souveraineté, de l’indépendance nationale et de la puissance d’équilibre.

Car dans l’antichambre de l’Occident, sous la pression des Etats-Unis, la classe politique de notre temps accélère et intensifie son aide financière et militaire à l’Ukraine, reculant et abrogeant progressivement toutes les limites fixées antérieurement pour prévenir un emballement militaire, pour résister à la montée aux extrêmes et empêcher le risque d’une guerre totale et mondiale.

Petit à petit, l’Occident, via son bras politico-militaire armé, l’OTAN, financé à 69% par les USA, décide de livrer à Monsieur Zelenski des armes plus lourdes, plus puissantes, plus fiables, plus précises, plus létales et à plus longue portée.

Le dernier palier franchi est celui de la formation de pilotes de chasse ukrainiens avec la perspective de la livraison d’avions de combat.

La guerre en Ukraine change donc encore d’échelle. Elle prend une dangereuse tournure, que la volonté de vaincre, de part et d’autre, n’arrête plus.

Pendant que l’Occident démuni, désarmé et décadent, organise désespérément son effort, en vidant les fonds de ses tiroirs, la Russie intensifie sa coopération avec la Chine, l’Iran et d’autres pays membres du BRICS.

Les peuples occidentaux voient bien vers quoi le monde se dirige : une longue guerre « par procuration », de haute intensité, d’usure et d’attrition qui fait couler le sang de centaines de milliers d’ukrainiens et de russes grâce à notre argent, à nos technologies, à nos armements, à notre passivité et à notre silence. Nous sommes en effet ligotés par le pouvoir, empêchés de nous exprimer et confinés au rôle de contribuables au « garde à vous » de cette guerre dont le coût est déjà exorbitant.

Ukraine et Russie mobilisent leurs ressources humaines ainsi que tout leur outil de production pour cette guerre. Les deux pays engagent le maximum de leurs capacités pour défendre leurs causes et atteindre leurs objectifs. Les armées ukrainiennes sont « dopées », conseillées et équipées en armes, munitions et renseignements par l’OTAN. Les flux d’argent, d’armements et de munitions vers l’Ukraine sont considérables et inédits. Etats-Unis et Union européenne orientent toutes leurs économies vers cet effort de guerre. USA et UE ont déjà mobilisé respectivement 72 et 50 milliards d’euros pour appuyer les armées ukrainiennes et le régime corrompu de Kiev alors même que le président de la Cour suprême vient d’être arrêté pour corruption.

De son côté, la Russie dispose de ses propres ressources industrielles et de sa créativité technologique, des missiles hyper véloces jusqu’à l’arme nucléaire, tout en étant soutenue par des alliés et des industries d’appoints avec des armements en provenance notamment de l’Iran.

Le risque vital et donc d’escalade militaire permanente est évident. C’est bien ce risque qui pousse chacun au dépassement, à l’accélération et à l’’intensification de son effort de guerre.

En 1945, la bombe atomique est larguée sur Hiroshima

(En 1945, la bombe atomique est larguée sur Hiroshima)

Ira-t-on jusqu’à l’emploi de l’arme nucléaire par Vladimir Poutine ? Quel est l’expert, aujourd’hui, en mesure d’affirmer ou d’infirmer clairement cette hypothèse, quand les doctrines de dissuasion ne sont pas immuables dans le temps et qu’elles sont aussi faites pour évoluer et s’adapter ? Qui peut en effet affirmer de façon certaine que Vladimir Poutine ne décidera pas, à un certain stade d’épuisement, de menaces et de fragilisation, d’employer massivement l’arme nucléaire sur des sites stratégiques occidentaux ?

Il est faux d’affirmer aujourd’hui que l’OTAN et l’UE s’autolimitent dans leur soutien à l’effort de guerre ukrainien.

Nos dirigeants occidentaux sont en train de se fourvoyer dans le bourbier ukrainien. Ils s’égarent, dans l’hystérie collective, bien loin d’un processus de paix pourtant possible sur la ligne de front actuelle. Ils font route ensemble, aveuglés par un désir absolu de victoire, catalysés par les passions, enfermés dans leur idéologie, sans recul, sans esprit de suite, sans vision de long terme, sans plan de sortie de cette guerre, et dans un état d’esprit de totale irresponsabilité vers le danger apocalyptique du franchissement du seuil de la dissuasion nucléaire.

Il faut que le pouvoir français prenne bien conscience que quand la Dissuasion nucléaire ne produit plus ses effets, parce qu’elle est normalement une arme de non emploi, alors le risque de son usage concret devient plus grand. Puisse Emmanuel Macron entendre et comprendre qu’il ne doit pas caresser l’illusion du non emploi de l’arme nucléaire car cette arme a déjà été utilisée au Japon par les américains pour mettre fin à la seconde guerre mondiale après six ans de conflit mondial.

Les Etats-Unis auront usé et abusé de la patience russe depuis 1991, et même depuis 1949, tant dans le champ géopolitique, avec l’expansion ostentatoire de l’OTAN à l’est, que dans le champ économique, avec leur détermination à provoquer une rupture entre la Russie et l’Union européenne. Ils ont eu une volonté stratégique de pression, d’endiguement, de frustration et d’humiliation de la Russie. Et la patience russe a pris fin avec sa réaction militaire du 24 février 2022, qui succédait à d’autres, comme son intervention en Géorgie à l’été 2008, et en Crimée en 2014.

Je ne suis ni un partisan de l’Ukraine, ni un pro russe. Je pense d’abord français, pour la France. Je pense le long terme, je pense à nos intérêts, à notre liberté de choix et de décision, m’appuyant sur la profondeur de l’histoire et sur nos besoins de sécurité, de paix et de prospérité. Je suis conscient que la Russie a payé la plus lourde facture humaine de la seconde guerre mondiale avec ses 26 millions de morts. Au nom de l’Atlantisme imposé par les USA, et consenti par Emmanuel Macron, je regrette que nous ne puissions plus faire commerce avec ce grand pays qui n’est pas dépourvu de ressources appropriées à nos besoins. Je déplore l’emprise américaine sur l’Union européenne. Et je dénonce notre alignement, notre perte de souveraineté et d’indépendance nationale.

Nous devons avoir une communauté de destin et d’intérêts avec les pays et les civilisations de notre choix. Nous ne devons pas nous soumettre aux caprices hégémoniques des Etats-Unis.

« Pardonnez-moi, mais ma position est juste d’inspiration gaulliste. »

Nous voyons se dérouler devant nous le choc complexe des impérialismes et des civilisations. C’est un des nombreux chocs de l’histoire, un choc irrationnel, qui met en jeu l’avenir d’un pays, l’Ukraine, mais aussi celui d’une grande et vieille nation, la Russie, à la recherche de son émancipation, comme la Chine, face à l’obsession de contrôle et de puissance des américains.

Il avait bien raison de dénoncer à l’époque une sorte d’autisme culturel. C’est encore bien pire aujourd’hui. Les gens ne pensent plus. Ils suivent. Et ça peut aller très loin. Trop loin.

Yann Bizien

20 mai 2023     

 

 

8 Commentaires

  1. Vous faites bien de rappeler que la russie a laissé 26 millions de morts pour combattre le nazisme, un fait historique que semble ignorer macron ! sinon il réaliserait combien il est ridicule de jouer les va-t’en guerre face aux russes!!!…tout cela prêterait à sourire si la situation n’était si explosive…

    • Comme voous avez raison, Monsieur ! Il faut au moins avoir fait son service militaire pour se déclarer “chef de guerre” comme Freluquet a tendance à trop le dire ! Ce qui n’est pas le cas en ce qui concerne notre président (même pas de majuscule pour le pourdré de l’Elysée) Mr BIRIZEN a parfaitemùent résumé la situation : la macronie aime patauger dans la fange qu’elle produit ! Mais ça, les lecteurs de Minurne que nous sommes l’ont compris depuis bien longtemps ….Où sont nos généraux ? de Gaulle ? Leclerc ? de Lattre de Tassigny ? Rares sont ceux qui résistent encore ….. ils méritent notre respect face aux importuns qui nous gouvernent.

  2. Tout est très bien dit, merci !
    Je n’ai jamais compris pourquoi la Russie était vilipendée ainsi, puisque sans elle, nous aurions tous été allemands !
    Quand 2 personnes se battent, le réflexe normal est d’essayer de les séparer……là, l’europe et ses c.nnards de dirigeants mettent de l’huile sur le feu !
    Donc, j’aurais tendance à penser que nous ne valons plus la peine d’être sauvés, alors le nucléaire……!

  3. Merci Mr pour votre commentaire très lucide.
    Hélas nous ne sommes plus tout a fait en démocratie. Normalement ce problème de l’Ukraine aurait dû être débattu à l’assemblée, afin de savoir si les français étaient d’accord pour intervenir.
    C’est dramatique.

  4. Merci pour cette parfaite analyse de la situation !Ce conflit russo -ukrainien ne présage rien de bon!Nous sommes au bord d’une guerre mondiale!En fait il y a 2 blocs : les Etats Unis et l’UE qui attisent les flammes et la Russie et la Chine! Le monde est en danger!Et les gouvernements occidentaux ferment les yeux car ils s’imaginent être les plus forts! Mais c’est un leurre!

  5. Merci…. Tout est clair et justement expliqué… Je pense qu’il faut effectivement tout faire pour que cette guerre cesse… Et je regrette que Trump n’est pas a la place de Biden… Et pour la France… Ce gouvernement est un désastre… Dorothee Delsaux

  6. Quel plaisir de découvrir ce matin qu’il existe encore des gens comme vous, dotés d’intelligence lucide et de bon sens, quand on constate chaque jour que l’attitude qui prévaut dans notre pays, et autour de lui, est celle de la déraison et du mensonge volontaire, dont l’issue prévisible est un embrasement mondial quand la Russie, qui a déjà été contrainte à l’agression militaire, se verra acculée à l’emploi du nucléaire, qui ne joue plus son rôle dissuasif.

  7. Je suis totalement d’accord avec votre position. Nous avons encore une lueur d’espoir avec la Présidentielle américaine de novembre 24. Si Trump revient, la guerre s’arrêtera. Cependant le complexe militaro-industriel et le deep state des USA feront tout ce qu’il faut pour l’empêcher de gagner et même sûrement de pouvoir se présenter. Le pire n’est jamais sûr mais il est probable !!

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