Soyons fiers de nous, et nous serons respectés !
(Denis Tillinac)

Amoureux de la Corrèze et ami de Chirac, il est mort un an jour pour jour après lui. Ecrivain foisonnant (il a publié notamment chez Plon au début de cette année le “Dictionnaire amoureux du Général”), il aimait profondément la France, son histoire, sa langue, ses terroirs. Homme de droite, il n’avait pas honte de se dire “réactionnaire” et chercha en vain, comme tant d’autres, à réaliser l’unité des forces patriotiques.
Merci à Didier H, un de nos fidèles lecteurs, de nous avoir signalé son dernier article, surprenant et poignant témoignage de ce qui nous reste à faire. Etre nous-mêmes, fiers de notre Patrie, de notre culture, de notre histoire. Sortir une fois pour toutes de cette stupide et stérile repentance qui, non seulement nous ridiculise face aux empires qui s’organisent et se développent sur la planète, mais suscite en même temps le mépris éperdu des jeunes Français qui ne se retrouvent plus dans l’histoire de leur pays et de celle de leurs pères…

MLS

 



 

Erdogan, Poutine, Xi, Trump à l’extérieur, les indigénistes et bien d’autres à l’intérieur jouent de notre réticence à nous affirmer pour ce que nous sommes.

On meurt pour défendre sa foi, sa liberté, sa patrie, sa famille. On meurt pour une idée de l’honneur héritée des ancêtres. Fort de cette évidence, Erdogan, le président turc, défie l’Occident en décrétant que Sainte-Sophie redeviendra une mosquée comme elle le fut du temps de l’Empire ottoman. Ça nous choque, mais ça se défend : en proie à de graves soucis internes, il use du ressort symbolique le plus efficace, le retour d’un âge d’or mythifié, identifié à une confession triomphante.

En s’acoquinant avec le patriarche de Moscou pour ressusciter la sainte Russie des tsars face à un Occident considéré comme décadent, Poutine occulte le marasme de son économie et la corruption de ses oligarques. Sa théocrature panslaviste nous choque, mais elle solde l’humiliation consécutive à l’implosion de l’empire soviétique.

Le mao-confucianisme de Xi règle lui aussi un compte avec l’ancien impérialiste en affirmant haut et fort la supériorité de la culture chinoise sur la démocratie à l’occidentale. Que la cohésion du groupe prévale sur la liberté de la personne nous choque, mais le maître de l’empire du Milieu exalte un sentiment de fierté qui masque les brutalités du régime. Sauf accident de santé ou conflagration politique, ces trois chefs disposent au moins d’une décennie pour concevoir et appliquer une stratégie. Leurs relations sont lourdes d’équivoques, mais ils partagent un désir de revanche sur l’Occident et l’ont inoculé à leurs peuples en invoquant leurs hautes mémoires. Nous voilà avertis!

L’Occident, ce sont les États-Unis et les pays de la “vieille Europe”. Autant dire l’héritage gréco-romain et judéo-chrétien qui a fécondé une civilisation, la nôtre, imbue de démocratie et d’État de droit, où le pouvoir temporel s’est émancipé de l’emprise religieuse, en conformité avec le message évangélique. Mais on ne meurt pas pour le principe démocratique et son assise dans le droit. Encore moins pour la laïcité. La France n’a du reste aucun problème avec la laïcité, il y a belle lurette que le clergé catholique a renoncé à encadrer la vie publique ; en conséquence, les litanies laïcardes ne sont que le cache-misère d’une démission et d’une lâcheté.

Nos “élites” se planquent derrière le paravent de la laïcité parce qu’elles ont peur de l’islam et n’osent l’avouer. Elles ont peur de leur peur, en proie à un fatalisme maquillé en tolérance qui les tétanise. Comment Erdogan, Poutine et Xi prendraient-ils au sérieux des chefs incapables de nommer ce qui menace leur peuple ? Seul compte Trump à leurs yeux. Il est confus, verbeux et bravache jusqu’à la puérilité, mais au moins il relève les défis en mobilisant la ferveur de l’Amérique profonde, où la patrie et la foi sont indissociables.

Nos propres gouvernants ne peuvent se résoudre à revendiquer notre héritage. Au fond, ils n’y croient plus. Sinon, ils enverraient paître sèchement les minorités récriminantes, qui, elles, ont le courage de leur ambition : anéantir les récits fondateurs de notre imaginaire collectif. Gérald Darmanin dénonce les méfaits d’un « ensauvagement » , en relais de Jean-Pierre Chevènement, qui fut, avant lui, locataire de Beauvau et signalait déjà les prémices d’une barbarie en termes identiques. En pure perte, car l’essor des agressivités “indigénistes” et autres répond mécaniquement à la fausse et mauvaise conscience qui ronge les âmes depuis au moins deux générations. Aucun ministre n’en enrayera les effets si un sursaut n’incite pas les hautes sphères de l’État à énoncer clairement ce que nous sommes. Et ce que nous ne voulons pas devenir. Nous sommes les rejetons d’Aristote et du Christ, des bâtisseurs de cathédrales et des humanistes de la Renaissance, du génie du Grand Siècle, de l’esprit critique des Lumières, des soldats de l’An II et de ceux de la Grande Armée, des “hussards noirs” de la République, des poilus de la Première Guerre mondiale et de l’armée des ombres en lutte à mort contre l’ennemi de la Seconde. Il faudrait que cela fût dit, publiquement et sans clause de repentance. Il faudrait aussi affirmer que jamais la France ne légitimera le ressentiment de factions ethniques, confessionnelles ou régionalisantes. À ce prix seulement nous renouerions avec le bonheur d’être français et Erdogan, Poutine, Xi, Trump et consorts auraient de bonnes raisons de nous respecter.

Denis Tillinac
Publié le 2 août 2020

5 Commentaires

  1. “En s’acoquinant avec le patriarche de Moscou pour ressusciter la sainte Russie des tsars face à un Occident considéré comme décadent, Poutine occulte le marasme de son économie et la corruption de ses oligarques.”

    Ah parce que la France n’est pas dans le marasme économique et la corruption ?!!! Mais bon sang, toute proportions gardées, c’est même pire pour un pays et Micron 1er qui se prétend donneur de leçons en Biélorussie et au Liban !!!
    Le Russe est l’ennemi juré du Turc depuis 1458. Et un jour, le Turc perdant son bouclier OTAN finira par se faire ratatiner. Poutine est un loup qui attend son heure pour faire payer les Turcs de quelques avions abattus, entre autres. Pour l’instant, il fait ami avec Erdogan pour que ce dernier lui fiche la paix et le laisse agir en Syrie contre les islamistes. Mais les Turcs ne perdent rien pour attendre… Au moins, Poutine et les Russes restent le dernier pays semi occidental fier d’être chrétien et patriote.

  2. Je salue Denis Tillinac dont je ne ratais jamais les lignes dans mon Valeurs Actuelles hebdomadaire. Belle plume d’un homme attaché à nos valeurs et à notre terre.
    Je le suivais moins dans son attachement à Chirac qui fut une belle crapule et un enfumeur de première … pour ne pas dire pire.

  3. Bravo tout est dit dans ce texte , mais comme nous sommes gouverner par des traîtres , des lâches et des corrompus , ce n’est pas prêt d’arriver ni d’être dit ! .

    • “Traîtres, lâches et corrompus” à l’image du peuple qui les a élu, non ? Enfin, la moitié. Toujours la moitié et encore la moitié. On a les dirigeants que l’on mérite dû au taux de connerie en hausse. Un peuple incapable de faire bloc de façon décisive et de décider clairement.

Les commentaires sont fermés.