NOS TRES CHERS EMIRS… (de Christian Chesnot et Georges Malbrunot)

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Christian Chesnot et Georges Malbrunot

Ces noms vous rappellent sans doute quelque chose…

On est en 2004, c’est la 2ème Guerre du Golfe. Deux reporters français ont été capturés en Irak le 20 août pour servir de monnaie d’échange à des enragés islamistes prétendant faire annuler la loi sur la laïcité. La rumeur court qu’une rançon de 15 millions de dollars aurait été versée pour assurer leur libération un peu avant Noël 2004, après 4 mois de détention, mais le gouvernement n’a jamais confirmé cette information…
Et ça vaut sans doute mieux…

12 ans plus tard, les 2 compères d’infortune publient un ouvrage explosif qui, dans n’importe quel pays démocratique, aurait pour conséquence immédiate de provoquer un énorme tsunami politique et la démission de quelques ministres, voire du gouvernement au grand complet. Mais, dans la France « apaisée » du « président normal », ça ne provoque que quelques bruissements épars qui risquent vite d’être étouffés dans la masse informe d’une information orientée, filtrée, aseptisée, (auto)censurée et fermement canalisée dans le courant naturel de la bien-pensance et du politiquement correct.

De quoi s’agit-il au juste ? Du Qatar, notamment. Vous savez, ce petit pays du golfe, indépendant depuis 1971, qui combine une organisation sociale moyennâgeuse à une modernité de facade, dûe à l’or noir et au gaz liquéfié. Une monarchie wahhabite, voisine de l’Arabie, de 2,4 millions d’habitants (dont une bonne partie quasiment réduits à l’état d’esclavage), répartis sur une superficie égale à celle de l’Ile de France.

Un système politique par ailleurs fortement soupçonné par la « communauté internationale » de protéger et de financer, comme son voisin saoudien, le terrorisme international.

Pour être complet, c’est au Qatar qu’on trouve le siège de la station d’information arabe Al-Jazira, plus ou moins liée aux Frères Musulmans et, pour l’anecdote, que se déroulera la Coupe du Monde de football en 2022 !

QATAR
QATAR

Chesnot et Malbrunot, en vrais journalistes d’investigation (du genre qui n’hésitent pas à risquer leur peau – on l’a vu – pour les besoins d’une enquête), se sont intéressés aux petits arrangements entre amis et plus particulièrement aux mauvaises habitudes prises par certains politiciens français vis à vis de certains diplomates du Qatar. En l’occurrence son Excellence Mohammed al-Kuwari, ancien ambassadeur à Paris de cette monarchie pétrolière de 2007 à 2013.

Version persique de Las Vegas et Atlantic City, l’ambassade du Qatar en France y est décrite comme « un distributeur de billets de 500 €, une agence de voyages ou encore la boutique du Père Noël » a affirmé Christian Chenot sur France Inter.
Sans oublier les  demandes de subventions pour financer mosquées, écoles, associations diverses…

Le Point cite le secrétaire d’Etat chargé des Relations avec le Parlement, Jean-Marie Le Guen, le député PS Nicolas Bays, l’ex-garde des Sceaux LR Rachida Dati, l’ancien Premier ministre Dominique de Villepin ou encore la sénatrice centriste Nathalie Goulet (présidente du Groupe d’Amitié France – Pays du Golfe) comme praticiens familiers de ce genre de comportement. Des cadeaux luxueux (montres Rolex, bons d’achat dans des magasins) jusqu’au financement de campagnes électorales en passant par la facilitation d’investissements qataris dans des entreprises françaises, tout y est, ou presque.

Malbrunot expliquait mardi sur RMC que Le Guen proposait de modérer les interventions parlementaires anti-Qatar contre le versement d’honoraires à une officine de communication. Comme l’explique un officiel à Doha, Jean-Marie Le Guen annonçait clairement la couleur. « Il disait à nos diplomates à Paris: « En tant que ministre en charge des Relations avec le Parlement, je tiens tous les députés et sénateurs de mon camp, via les questions au gouvernement. Je peux bloquer des questions hostiles au Qatar, ou au contraire les alimenter. Mais je n’ai pas à le faire gratuitement ». Bref, « il nous faisait littéralement du chantage » (1).

De quoi provoquer un « QATAR GATE » si tout ce beau monde ne se décide pas à démentir d’urgence !

Sur Twitter, Jean-Marie Le Guen parle « d’allégations délirantes », annonce qu’il porte plainte en diffamation et qu’il poursuivra « tou(te)s les personnes qui reprendraient ces propos mensongers ».

Quant à Rachida Dati, voici ce que rapporte un membre de l’ambassade : « Elle ne demandait pas moins de 400.000 euros pour son association. Une somme extravagante ! » Elle présente sa requête lors d’un dîner avec Meshaal al-Thani, le nouvel ambassadeur, un peu moins « cool » que son prédécesseur, un dimanche soir, le 22 novembre 2015 exactement. Mais le diplomate lui fait comprendre qu’il sera difficile d’y répondre positivement. Elle semble choquée par ce refus, qui lui sera notifié par une lettre officielle signée du représentant du Qatar en France.
Le lendemain matin, Rachida Dati est l’invitée du talk show de Jean-Jacques Bourdin sur RMC. Nous sommes dix jours après les attentats du Bataclan et du Stade de France. L’ancienne ministre change de pied et charge le Qatar: « L’Arabie Saoudite ou même le Qatar ont une volonté de développer leur idéologie, notamment pour contrer l’islam chiite, affirme-t-elle. On a des pays du Golfe qui financent des mosquées, des associations, des imams […], des structures qu’on ne contrôle pas », regrette-t-elle. Quand il entend cela, l’ambassadeur n’en revient pas. « Elle dîne avec moi en me demandant de l’aider, et le lendemain elle nous traîne dans la boue ! » (1)

On trouve dans le livre des plaintes d’hommes politiques comme Dominique de Villepin parce que leurs voyages n’auraient pas été financés par les pays du Golfe ou alors dans des conditions manquant au standing qui leur serait dû, ou encore parce que le cadeau qui leur aurait été promis ne serait finalement pas arrivé.

Pas triste non plus, la sénatrice de l’Orne Nathalie Goulet, essuya elle aussi chaque fois un refus clair et net du nouveau représentant du Qatar à Paris. Elle a pourtant multiplié les demandes. Fin 2015, elle appela d’abord le bureau de l’ambassadeur pour se plaindre de n’avoir pas reçu son cadeau de Noël. « Comment se fait-il que je n’aie pas reçu mon cadeau de fin d’année, d’autres sénateurs en ont eu un et pas moi? », protesta-t-elle. « Qu’elle aille au diable! », maugréa Meshaal lorsque son collaborateur lui rendit compte de l’appel de Mme Goulet (1)

S’il y a un député dont le nouvel ambassadeur du Qatar se montre particulièrement lassé, c’est Nicolas Bays, élu socialiste du Nord – Pas-de-Calais. Membre du groupe d’amitié France- Qatar, il était proche de l’ancien ambassadeur Mohammed al-Kuwari. Avec son successeur, Bays ne fait pas dans la dentelle. Il a personnellement envoyé un SMS à Meshaal al-Thani, dont un témoin nous a rapporté le contenu: « J’ai des problèmes financiers actuellement. La mère de notre jeune enfant est fatiguée. Je voudrais l’emmener à l’étranger. Mais mon budget est un peu serré. Peux-tu me faire inviter dans un hôtel de Doha et nous payer un billet d’avion sur Qatar Airways ? Cela m’aiderait, s’il te plaît ».

DOHA, LA CAPITALE
DOHA, LA CAPITALE

Loin d’être découragé par un premier refus, le député Bays a sollicité à deux reprises encore, par SMS, l’ambassadeur du Qatar. Une première fois, pour lui demander de l’argent afin de payer des travaux dans sa maison. Le diplomate n’a pas répondu. Enfin, il n’a pas hésité à lui réclamer des chaussures de marque (1)

Autre victime de la nouvelle donne, le ministre vert Jean-Vincent Placé, qui se plaint dans le carré VIP du PSG que l’ambassadeur actuel ne l’invite plus à des week-ends. « Placé ne recevait pas que des cadeaux de son prédécesseur », souligne un proche de l’ambassade qui refuse d’en dire plus (1)

Bref, un bouquin qui va faire un malheur, y compris au sens propre pour ceux qui en sont les héros malgré eux !

Décidément, comme l’a dit Hollande avec un à-propos qu’on ne saurait que saluer, « ça imprime trop », ces derniers temps !

Marc Le Stahler

(1) Source : Challenge Magazine

Nota : Les informations publiées sur cet article sont tirées d’un ouvrage dont l’authenticité des faits rapportés n’a pu être strictement vérifié, mais dont les auteurs sont réputés fiables par leur sérieux et par la qualité de leurs sources. 

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