UKRAINE : AFFRONTEMENT OCCIDENT / RESTE DU MONDE (Jean Goychman)

Il ne fait plus guère de doute que la disparition de l’Union Soviétique n’a été qu’une étape dans le plan de domination mondiale des Anglo-Américains. La guerre froide a été la suite logique des deux précédentes guerres du vingtième siècle. La première a conduit à la disparition des empires monarchiques et la seconde à celle des empires coloniaux. Cette réduction progressive des opposants tenait un peu des compétitions sportives où les sélections des gagnants se font par rencontres successives dans lesquelles les vainqueurs du jour s’affrontent le lendemain jusqu’à l’épreuve finale qui permet de désigner le grand vainqueur.


Après 1945, l’étape suivante était la disparition des États-Nations.

 

 

 

Après l’éclatement de l’URSS, on aurait pu croire que le Communisme avait été vaincu et qu’une ère de paix allait enfin régner sur la planète, puisque ce mal absolu qui empêchait la Liberté de d’étendre ses bienfaits à toute l’Humanité avait disparu à l’issue d’un vertueux combat où le Bien avait triomphé du Mal. Certes, le Communisme n’avait pas été, loin s’en faut, le « paradis sur terre » qu’il prétendait être et sa disparition ne doit pas susciter le désespoir, mais il apparaît qu’en réalité, c’était surtout un prétexte, si l’on croit l’ancienne Chancelière Angela Merkel, pour entretenir un conflit qui, à terme, devait faire disparaître la Russie.

L’UKRAINE, POINT FAIBLE DE LA RUSSIE

D’après elle, et de nombreux spécialistes géopolitiques, le danger que présentait la Russie ne venait absolument pas d’une quelconque idéologie, mais de sa position géographique et surtout de son immense territoire et de l’abondance de ses ressources de toute nature. Son existence même interdisait toute domination mondiale et sa situation aux confins de l’Europe et de l’Asie condamnait à l’échec toute tentative de contention de la Chine. Le plan de contrôle mondial de l’élite internationale ne pouvait se dérouler qu’après la neutralisation de ces deux nations que leurs poids économique et militaire rendaient incontournables.

Angela Merkel, avec une certaine candeur, admet que les fameux « accords de Minsk » n’étaient qu’un moyen de gagner du temps pour que les États-Unis, agissant sous le faux-nez de l’OTAN, puissent gagner du temps pour armer l’Ukraine (dont ils venaient de prendre le contrôle après les événements de la place Maidan) et d’entraîner son armée en vue du conflit avec la Russie qu’ils pourraient déclencher le moment venu.
Après cet aimable préambule, Angela Merkel précise au journal italien « Corriere della serra »

« I want to talk to you about an aspect that makes me think. It’s the fact that the Cold War never really ended, because ultimately Russia was never pacified. When Putin invaded Crimea in 2014, he was excluded from the G8. In addition, NATO has deployed troops in the Baltic region, to demonstrate its readiness to intervene. And we too have decided to allocate 2% of GDP to military expenditure for defence. CDU and CSU were the only ones to have kept it in the government programme. But we too should have reacted more quickly to Russia’s aggressiveness ».
(“Angela Merkel: Kohl took advantage of his voice and build”),
dont voici la traduction :   

« Je veux vous parler d’un aspect qui me fait réfléchir. C’est un fait que la guerre froide ne s’est jamais terminée, parce qu’il n’y a jamais eu de véritable paix avec la Russie. Lorsque Poutine a envahi la Crimée en 2014, il a été exclu du G8. De plus, l’OTAN a déployé des troupes dans les pays baltes, afin de démontrer sa capacité d’intervention. Et nous avons décidé, de surcroît, de porter à 2 % notre budget militaire. La CDU et la CSU ont été les seules à l’avoir conservé dans leur programme de gouvernement. Mais nous avons aussi réagi plus rapidement à l’agressivité de la Russie »

 Au sujet du redéploiement de l’OTAN, Georges Friedman, le patron de la Stratfor, avait tenu une conférence à Chicago la même année dans laquelle il donnait le point de vue du Département d’État (et de l’état profond américain) sur sa vision de l’Europe. Le point essentiel pour eux, depuis Bismarck, était d’empêcher tout rapprochement économique entre l’Allemagne et la Russie. Cette crainte, héritée de l’Empire britannique, était pour eux la seule chose vraiment importante concernant l’Europe. Vous conviendrez qu’il y a une différence cosmique entre ce qui nous est raconté par certains médias « mainstream » et cette réalité qui apparaît aujourd’hui.

DOMINER LE MONDE, UN PROJET PLUS QUE CENTENAIRE.Qui domine le monde ?

Entrepris par l’empire britannique à la fin du dix-neuvième siècle, le flambeau fut passé aux États-Unis après l’échec de la conquête de la Chine au tout début du vingtième siècle. L’industrie américaine, contrôlée par la finance anglo-saxonne, était devenue la première au monde et la prise définitive du contrôle de la monnaie américaine par ces financiers allait considérablement accélérer le plan de conquête mondiale. Les différentes étapes, et notamment les deux guerres mondiales, ont conduit à la situation hégémonique des USA en 1945.

Depuis 1944, une offensive « à bas bruit » avait jeté les premiers grappins mondialistes autour de la planète. Les grandes conférences internationales destinées à établir la prééminence américaine dans de nombreux domaines tels que la finance, les transports, le commerce international et surtout l’organisation dite « des Nations Unies », née à l’issue de la Conférence de San Francisco, allaient faire prendre forme à ce Nouvel Ordre Mondial.

L’ONU était l’héritière de la SDN (Société des Nations) créée en 1921 sous l’hospice du CFR (Council on Foreign Relations). L’échec de la SDN, dû à l’isolationnisme du peuple américain, avait fait comprendre au CFR la nécessité d’impliquer l’opinion publique américaine en jouant sur « la destinée manifeste » du peuple américain qui avait besoin d’un corpus moral pour s’intéresser aux affaires du monde. L’ONU, avec sa Charte mettant en avant le respect des souverainetés nationales et l’intangibilité des frontières des nations, allait incarner l’Autorité supérieure qui se porterait garante de la Paix. Sans dire ouvertement que les États-Unis avaient vocation à diriger le Monde, il fallait néanmoins désigner des ennemis permanents de la paix mondiale pour justifier des interventions militaires, au nom de la Liberté et de la Démocratie.

C’est ainsi que le monde fut divisé en deux peu de temps après la seconde guerre mondiale, avec un camp du Bien incarné par l’Occident (derrière lequel se retranchaient prudemment les États-Unis) et celui des pays qui étaient sous l’influence communiste des Soviétiques, au premier rang desquels se trouvait la Russie. L’idée sous-jacente était d’agglomérer au « camp du Bien » tous les pays qui n’étaient pas encore de l’autre côté et ainsi, de proche en proche, les mettre dans leur camp en isolant davantage tous les pays du bloc soviétique, jusqu’au moment où il deviendrait possible d’opérer la « grande réunification » ayant pour conséquence l’établissement d’un gouvernement mondial. Le préalable nécessaire était naturellement de « mettre au pas » tous les pays capables de s’opposer à ce projet mondialiste. La Russie, de par son étendue, ses ressources et sa puissance militaire, a toujours incarné cet « homme à abattre ».

La guerre en Ukraine s’inscrit à l’évidence pleinement dans le déroulement de ces opérations.

LE PETIT GRAIN DE SABLE DES NATIONS

Cependant, la conquête des « non-alignés » n’a pas été aussi facile que prévu et un certain nombre de pays sont devenus réticents. Sans revenir sur le rôle très néfaste du dollar dans l’économie des pays les plus pauvres, et qui justifie à lui seul une étude particulière, certains d’entre eux , par la volonté de l’élite financière mondialiste, sont devenus dans les faits « les ateliers du Monde ».

Ils prirent conscience, au fil du temps, du poids que cela pouvait leur donner et cherchèrent à s’unir pour se renforcer mutuellement. Réalisant que l’établissement d’un gouvernement mondial allait faire disparaître les souverainetés nationales à laquelle ils demeurent très attachés, ils ont entrepris de s’organiser afin de se libérer de cette pesanteur américaine qui les empêche de revendiquer la place économique et politique à laquelle ils peuvent prétendre.

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Leur concentration géographique en zone pacifique favorise ces rapprochements et ils se dotent de moyens de paiements internes à leur zone qui sont autant de perte d’influence du dollar, et donc des États-Unis.

Cependant, leur projet n’est pas destiné à faire disparaître les nations ni les peuples qui les constituent et ne peut pas s’inscrire dans le projet mondialiste d’un monde monopolaire.

QUELLE PLACE POUR L’EUROPE ?

Dans ce combat de Titans, quelle va être la place de l’Europe et surtout, quel va être son périmètre futur ? L’image d’une Union Européenne maître de son destin s’est largement estompée au fil du temps. Le projet fédéraliste, qui a été imposé par ses instances plus mondialistes que réellement et intrinsèquement européennes, ne se concrétise pas, bien au contraire, et laisse apparaître sa réalité, qui était de faire de l’Union Européenne une sorte d’antichambre de ce monde monopolaire.

Les actuels dirigeants européens ont, pour la plupart, rallié la vision américaine et font le pari de la victoire de l’hégémonie américaine. Cela les conduit à prendre ouvertement parti pour l’Ukraine alors que rien, sur le plan du droit international, ne les oblige à le faire.
Bien au contraire, ils auraient dû imposer la neutralité de l’Europe afin de pouvoir, le temps de la négociation venu, s’inviter autour de la table. L’Europe s’en serait trouvée renforcée et aurait ainsi démontré à la fois son existence et son utilité.

Rentrer aujourd’hui dans la cobelligérance, comme c’est le cas, risque d’être fatal, notamment si les partisans d’un monde multipolaire l’emportent sur les partisans d’un monde monopolaire, dont l’ensemble se superpose (au Japon près) à ce qu’il est convenu d’appeler l’Occident qui, faut-il le rappeler, ne représente plus que 12 % de la population mondiale. En outre, cette attitude risque d’éloigner définitivement la Russie de l’Europe en l’arrimant davantage à l’Asie. Cela mettrait un terme définitif à la vision gaullienne d’une Europe « de l’Atlantique à l’Oural ».

POURQUOI NE PAS ANNONCER CLAIREMENT LES CHOSES ?

En se référant au début de cet article, comment douter que nos dirigeants européens ne soient pas conscients de ces évènements ?

Pourquoi n’exposent-ils pas la situation à leurs concitoyens, de la manière la plus claire possible et surtout, pourquoi ne leur demandent-ils pas leur avis, eux qui prétendent agir au nom de la Liberté et de la Démocratie ? Il paraît totalement incohérent d’aider militairement l’Ukraine au nom de la défense de ces valeurs alors que visiblement, la victoire des mondialistes prônant l’établissement d’un gouvernement mondial ferait justement disparaître la démocratie et les souverainetés nationales. Car le véritable enjeu est bien là, et les chances de succès de l’Occident semblent s’éloigner de jour en jour, au rythme où le dollar se voit supplanté dans les transactions internationales et que les investisseurs se détournent des achats de bons du Trésor américain.

On peut volontairement chercher à occulter cet aspect des choses, il n’en demeurera pas moins prépondérant et nos dirigeants devraient se souvenir que, dans le contrat moral qui les lie à leurs électeurs, ils ont comme devoir premier d’agir en l’intérêt exclusif de ceux qu’ils sont censés représenter. Alors, bien-sûr que ces valeurs doivent être défendues, mais si et seulement si elles s’avèrent également conformes à l’intérêt des peuples.

Aujourd’hui, cet intérêt des peuples européens commande de rester neutre dans ce conflit qui oppose les tenants de deux visions totalement différentes du monde, faute de quoi l’Europe va s’affaiblir et en particulier la France, qui risque de se trouver écartée pour longtemps de la capacité d’influence qui a fait d’elle une voix écoutée dans toutes les instances internationales.

Jean Goychman

10 janvier 2023

6 Commentaires

  1. Les Européens sont trahis en permanence par leurs dirigeants, et ça ne les émeut pas plus que ça. Leur inaction montre un consentement dont abusent nos dirigeants sans vergogne. Pour les citoyens européens, le fait d’avoir la liberté d’aller venir et de vivre dans le confort leur montre que nous sommes en démocratie ! La possibilité de vivre “librement” leur suffit comme preuve, or ce n’est qu’une illusion. Certains l’ont compris, mais pas la majorité qui vote encore pour les mêmes bourreaux et pilleurs patentés.

    La France n’a aucun intérêt en Ukraine et aurait dûe rester neutre, mais Micron le fol est à la botte de la CIA, donc emmène le peuple français à l’esclavage qui plus est consenti. Et les Français en sont encore pour la plupart à se poser des questions sur la malveillance de l’état dont beaucoup doutent encore.

  2. Merci pour cette bonne analyse.
    ”Bien au contraire, ils (les dirigeants européens) auraient dû imposer la neutralité de l’Europe” …… tout est dit !

    Un peu hors sujet mais, ……..n’empêche que les français avaient voté NON au référendum de 2005, et que ce sal..ard de sarko nous a trahi …et c’est là que le peuple aurait dû réagir !

    • Notre gouvernement nous entraîne délibérément vers une nouvelle guerre mondiale, et contre notre seul allié : la Russie. Les entraînements militaires internationaux s’intensifient (le projet Orion fait suite à “Defend Europe”), et se font en France à nos frais bien entendu (la défense du pays nommé “Arnland” dans le projet Orion n’a rien à voir avec l’ARN des vaccins mais avec l’Arnland en Suède, il s’agit d’anticiper une invasion de la Suède par la Russie).

  3. Votre article m’a aide à comprendre encore des choses.
    On peut dire que la politique étrangère c’est complexe mais les ambitions ont toujours les mêmes (de Cesar à biden en passant par Napoléon)..Tous ces hommes et leur systême ont commis les mêmes erreurs :cesar et cléopatre qui s’accuseront de trahison , biden et poutine , Napoléon et son aveugle ambition mais peut être aussi trahi par ses fr^res qui n’étaient pas à la hauteur de ses ambitions.. Créer un etat universel , c’est comme se perdre dans le ciel: la prétention est démésurée dans l’idée absolue que l’homme est sans limite.Certes! mais tout le monde n’est pas sur le même braquet et c’est là ou le bas blesse.Il n’y a plus de philosophie politique véritable et applicable (communisme ,anticommunisme,democratie et même royalisme car tout ces discours ,et chansons c’est pour les peuples qui ne font ne feront que recueillir du ciel les miettes absurdes tombées
    d’ une sorte de caisse noire dirigée par des fantômes du nord au sud et de l’est à l’ouest.
    Vous comprendrez la suite vitale avec soit l’anarchie ,soit le Madmaxisme (oui c’est une nouvelle politique voisine de l’anarchie en plus violent.Un peu à,l’image de deux extrêmes.C’est une théorie qui n’engage que moi mais que je souhaite pas du tout.Ce monde nouveau m’angoisse profondément mais je me refuse d’accepter.

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